Pourquoi nous avons tous aimé “C’est pas sorcier”

Quand j’étais petit, les émissions scientifiques pour les jeunes étaient plutôt rares à la télévision. Il y en a une en revanche qui faisait l’unanimité et qui aura traversé le temps : “C’est pas sorcier”. C’est simple, l’émission aura tenu de 1993 à 2014 (plus de 20 ans à la TV, un record !).

Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, les épisodes ressemblaient à ça :

Une telle longévité pour une émission de vulgarisation scientifique n’est pas le fruit du hasard. Quelque part, les concepteurs de l’émission ont trouvé une recette qui mérite d’être décortiquée. Je pense m’en être moi-même inspiré involontairement en concevant mes cours sur OpenClassrooms.

Alors, pourquoi avons-nous tous aimé “C’est pas sorcier” ?


Observations de terrain

L’équipe de l’émission n’avait pas peur de se déplacer. En effet, quoi de plus logique que d’aller observer des évènements sur le terrain pour ensuite se poser des questions ? C’est ce que nous faisons tous naturellement depuis que nous sommes nés (nous avons parfois tendance à l’oublier !).

Encore fallait-il le faire et mouiller sa chemise pour, par exemple… escalader des glaciers :

L’un des animateurs, Fred, en pleine ascension d’un glacier pour l’émission

Le concept mobile de l’émission a été introduit dès le début, grâce à un camion “C’est pas sorcier” (sorte de laboratoire mobile) :

Le célèbre camion C’est pas sorcier

Les maquettes

Les maquettes viennent tout de suite à l’esprit quand on pense à l’émission. C’est simple, il y en avait dans tous les épisodes. Elles étaient à la fois simples et riches, avec une petite touche d’interactivité.

Jamy aux commandes des maquettes

Ce côté “fait main” et interactif des maquettes a grandement contribué au succès de l’émission.

Pour la petite histoire, vers la fin l’émission aura tenté de passer à des animations 2D et 3D (plus “modernes”), avant de faire rapidement marche arrière.

Il ne suffit pas d’utiliser des outils numériques pour que cela soit plus pédagogique. C’est à mon sens souvent le contraire : des objets physiques sur une maquette nous permettent de nous relier plus facilement aux concepts, qui paraissent du coup bien moins abstraits.

Jeu des questions / réponses

Le fait qu’il y ait 2 animateurs dans chaque épisode (+ une voix off) n’est pas un hasard non plus :

  • L’un voyageait et observait, ce qui amenait à se poser des questions.
  • L’autre pouvait alors répondre, sur la base de maquettes.

Ce jeu de questions / réponses permettait de se mettre dans la tête du spectateur… qui se posait à coup sûr les mêmes questions. Il avait donc les réponses sans avoir besoin de demander.

Une petite TV dans le camion permettait de faire la passerelle entre les 2 animateurs :

“Eh Jamy, tu sais comment ça marche toi le portable ?”

J’ai moi-même usé et abusé du concept des questions / réponses dans les cours dès les débuts du Site du Zéro puis encore aujourd’hui sur OpenClassrooms. Comme j’étais seul en revanche, je me posais les questions et j’y répondais, de façon un peu schizophrénique. 😜

L’humour

C’est à mon sens un élément crucial dans l’émission. Les blagues et jeux de mots, qu’ils soient drôles ou pas, montrent que les présentateurs savent rire d’eux-mêmes et qu’ils ne se prennent pas trop au sérieux. Cela donne d’eux une image accessible.

Il ne faut pas sous-estimer ce point, il est essentiel. En jouant sur le ridicule, on se défait de l’image du professeur sur son estrade, le “sachant” inaccessible auxquels les élèves doivent rêver de ressembler.

En se montrant simples et drôles, les présentateurs de C’est pas sorcier ont fait tout le contraire : ils ont montré qu’ils étaient comme leurs spectateurs.

Ce bêtisier devrait vous convaincre que le but recherché est atteint. 😅

Une clé : la passion

Si on observe quelques instants, on ne peut pas la manquer. La passion pour la vulgarisation scientifique se voit clairement dans l’émission. Elle est là, en filigrane, depuis les débuts.

C’est d’elle que découle tout le reste. Sans passion, ils ne se seraient pas déplacés sur le terrain, ils n’auraient pas pris le temps de concevoir les maquettes ou n’auraient certainement pas osé faire des jeux de mots.

La passion est contagieuse. Elle se voit dans une somme de petits détails, comme l’émerveillement, l’étonnement, les sourires…

Contrairement aux points précédents, il n’y a pas de recette magique pour générer de la passion. Si elle n’avait pas été là dès le début, la sauce n’aurait pas pris. Il fallait donc que les présentateurs, en véritables entrepreneurs, prennent leur bâton (ou camion) de pèlerins pour aller transmettre leur passion.

Rien que pour ça et pour tout le reste, Fred, Jamy, Sabine : un grand merci. 🙏


Bonus : l’émission est définitivement arrêtée, mais toutes les vidéos sont disponibles gratuitement sur Youtube. Bon binge watching. 🤓